Première fois qu’André et Marion, nouveaux membres, montent à bord de Bob pour un tour en mer. Première fois qu’Hélène et François montent sur un voilier. Première fois que je navigue avec un équipage jamais rencontré à bord. Il y a toujours une première fois comme disait Adam. Continuer la lecture de Week-end de Pentecôte. Une première !
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London’s Rally 05/05 au 08/05/2016
Mon esprit coutumier fait de sobriété et de concision (c’est moi qui le dis!) risque d’en prendre un sérieux coup. Pour paraphraser d’un trait de plume une sanction chère à nos petits enfants : ce fut génial!
Partis, dès potron jacquet de notre cher ponton H21 du WSKLuM de Nieuwpoort, nous étions guillerets et joyeux de côtoyer pendant 4 journées le soleil, le vent et les amis. Cinq au départ, cinq à l’arrivée, je vous rassure. Il y avait
Marc, président, skipper émérite, médecin à ses heures, petit jeunot du groupe, pas vraiment timide pour autant, et faisant état d’un palmarès nautique enviable et envié, mais également d’une faconde qui fait la part belle aux poncifs, je vous l’accorde, mais aussi aux connaissances véritables et, tenez vous bien, à une veine humoristique avec l’accent quand il le faut;
Joseph, le second du bord, à la chevelure blanchie sous le harnais, aux mains devenues habiles au contact de ses chers petiots, aux connaissances techniques qui en font un pion majeur de notre association, et à la rondeur joyeuse encouragée par un solide roulement des R qui nous le font assimiler selon les circonstances à un gars du nord du pays ou à un borain;
Jacques, réellement inénarrable, inlassable bavard à la veine comique servie par un parler patoisant mi-chti, mi-mouscronnois, mais également parfait homme de bord se transformant aux heures idoines en cuisinier de classe aux petits plats merveilleusement présentés dans la vaisselle luxueuse en limoge de plastique, avitailleur de qualité tout en finesse et mesure, et enfin équipier compétent qui ne doit qu’à sa volonté propre de s’inscrire dans une nouvelle appellation de “apprenti-mousse” qui lui sied à ravir;
Eric, skipper en titre, mais oeuvrant cette fois incognito, titulaire de la plus grand chambre du bord, le carré, où il put à loisir étaler la richesse inégalée de son fouillis savamment éparpillé à l’image d’une barbe poivre et sel que l’on pourrait sans doute qualifier d’hirsute ainsi que d’une chevelure au diapason cachée parfois d’un couvre-chef africain cabossé témoin du parcours varié de ce très gentil compagnon dispensateur généreux des points permettant aux novices de gravir les échelons des grades de “apprenti-mousse” à “mousse-confirmé”.
Yves, c’est moi, et à ce titre très mal placé pour le décrire, si ce n’est de le montrer en patriarche âgé coulant un oeil heureux sur les ouailles qu’il eût sans doute fallu circonvenir, ce que heureusement il se garda de faire.
A sept heures, nous lançons les voiles. La grand-voile d’abord, toujours blanche et solide qui étrenne sa deuxième livrée annuelle, le génois ensuite qui dévoile à nos yeux attentifs sa blancheur immaculée de première communiante. Marc l’examine sous toutes les coutures, jauge son recouvrement nouveau, passe une main amoureuse sur la ralingue d’étai et, ô surprise, constate avec effroi un écartement jugé anormal de deux parties dudit étai…La sentence tombe terrible et désolante :”Impossible de continuer dans ces conditions”. Retour entrepris vers la base et discussion entre techniciens du bord et d’ailleurs. Nous sommes jour d’Ascension. Les chantiers sont fermés. Alors, que faire? Je ne sais qui proposa de maintenir deux tours d’enrouleur de génois, gainant ainsi l’étai délicat qui s’en trouverait renforcé.
Une heure et demie plus tard, nous voici repartis vers Londres et nos attentes. Le temps est réellement superbe, le vent malheureusement insuffisant que pour couvrir d’une seule traite les 83 milles du trajet jusque Sheerness dans l’estuaire de la Tamise. Nous testons le moteur qui répond à nos espoirs. Ainsi jusque midi quand soudain Eole nous invite à gracieusement nous appuyer sur ses souffles généreux. Au point que très bientôt, le grand largue nous y entraîne, nous sortons de sa cache le grand sac jaune du gennaker blanc et bleu qui gonfle rapidement sa corolle au devant de l’étrave et du bout dehors installé.
Toute médaille a son revers. Nous en fîmes le constat. Dessous la planche de support du spi, de l’eau est apparue, qui s’avère mi-marine, mi douce et qui pourrait, selon nos hypothèses, provenir du bouchon du loch imparfaitement (peut-être) ajusté. Une découverte en pousse une autre. Dessous le plancher du carré rapidement enlevé, d’autres quantités d’eau paraissent à nos yeux. Dessous la chaîne d’ancre seconde, même constat alarmant. De l’eau, toujours de l’eau. Joseph s’inquiète du moteur et y relève là un manque d’eau….presque un comble!
L’équipage retrousse les manches et méticuleusement pompe, passe l’écope, éponge, assèche au moyen de papier de cuisine tout ce qui doit l’être et recommence consciencieusement jusqu’à ce que le résultat lui paraisse convaincant. On laisse le tout ouvert et vaquons à d’autres occupations que les équipages connaissent généralement et qui prennent nom apéritif, dîner, sieste sur le pont au soleil ou sur la couche à l’ombre. Les vigies alternées sont tenues en éveil par le soliloque généreux du troubadour-ménestrel-amuseur public déjà décrit ci-dessus.
7 heures 30 d’un seul bord avec grand-voile et gennaker qui entraînent Bob à 6 puis sept, puis huit et même neuf nœuds sur une mer plate d’un vent de terre idéalement positionné.
Nous atteignons l’estuaire de la Tamise, ses champs d’éoliennes, ses tours de guet d’un autre âge, ses gros cargos pas trop nombreux toutefois. A 23 heures nous nous accrochons à la tonne et dévorons un rôti de porc ardennais, compotes de pommes de terre et de pommes délicieusement préparé sous vide par Pauline, la fille de notre copain Manu (adresse à vous recommander). Le couple du bord, Marc et Jacques, s’en fut ensuite en chambre du propriétaire comparer ses ronflements sonores et variés, et les autres tristement en cabine arrière se plonger dans la désolation d’une nuit esseulée qui fut malgré tout réparatrice. Je ne parle pas de l’occupant du carré qui a disparu sous une avalanche de choses, couvertures, coussins, vêtements, sacs de couchage, sac tout cours et gît probablement étouffé sans que cela n’inquiète pourtant l’équipage. Nous verrons à l’aube ( 7 heures locales ) qu’il n’en sera rien.
L’estuaire défile le lendemain sous voile et moteur alternés et les South Docks de Londres sont atteints vers 13 heures.
Accueillis par un équipage issu de la Force Aérienne de Nieuport, nous nous installons, vérifions les fonds du bateau qui paraissent s’assécher progressivement, le moteur qui conserve son niveau, récurons de chacun de nous ce qui doit (vraiment) l’être dans les vestiaires relativement basiques de la marina et partons à la découverte de Londres, par Covent Garden, le quartier chinois, la Tour de Londres, le pont, les quais animés à l’extrême. Les émotions et la marche creusent et l’inévitable Fish & Chips est le bienvenu malgré une ambiance réellement tonitruante qui impose par le fait même le silence radio à l’un d’entre nous. Curieuse impression que ces visages concentrés sur une assiette abondamment garnie, sur ses mains qui alternent fourchettes et pintes de bière sans que l’ébauche d’une conversation ne vienne troubler l’instant. Nous nous échappons rapidement soulagés mais repus et retrouvons en bord de Tamise l’air frais et un taxi qui nous posera en marina de Bob.
Samedi de soleil à nouveau et d’occupations diverses dont celles de vérifier attentivement les fonds du Bavaria qui s’avèrent de plus en plus secs. A midi, briefing des équipages belges du Rally sur le bateau, un superbe OVNI 365, de l’un d’eux avec une droppeltje offerte par Max qui n’est pas des nôtres, malheureusement (?) esseulé en Sint Katharina Docks où il a pu trouver exceptionnellement le gîte. Nous apprenons que nous serons de la première éclusée de 13h45 pour quitter la marina.
Retour ensuite vers Sheerness et sa tonne et les merveilles de Pauline, trouvées cette fois sous la forme d’un couscous-merguez de bien bonne facture.
Pour profiter de la marée et de son courant, Marc dans sa grande sagesse marine décide de partir le dimanche à 3 heures avec un premier quart que je lui partagerai suivi ensuite de celui formé de Joseph, Eric et l’apprenti-mousse. Je jouis à la barre du déploiement des lumières de l’estuaire, des recherches inquiètes des éclats variés de bouées, des interrogations constantes du profondimètre, mais aussi de la grande sérénité dégagée par le capitaine. Quel merveilleux privilège, au mitan de la septantaine, de s’appuyer sur une jeune épaule qui inspire la confiance. Naviguez avec eux, nos chers skippers, et vous connaîtrez l’extase!
Retour aux tours de guet, au champ d’éoliennes que nous laissons à bâbord pour piquer vers Dunkerque et profiter d’un flux de vent qui nous permettrait de faire ensuite un près vers notre port d’attache. C’est ce qu’il advint. Le vent se renforcera quelque peu et nous invitera en un seul bord à rejoindre Nieuport vers 18 heures.
Il faudra sans doute recueillir rapidement les avis éclairés d’un professionnel pour taire nos inquiétudes d’étai. Pour le reste, Bob semble en bonne forme. La glisse fut réellement souple et fluide sur cette mer exempte de clapot et de vagues. L’électricité du bord est à peu de chose près correcte (voir feu de mât), les craintes d’entrées d’eau semblent infondées, les chemises de pare-battages doivent être apportées et enfilées, un cordage d’icelle doit être remplacé, le cordage d’enrouleur de génois aurait besoin qu’on le remplace, et autres petites choses qui mériteraient examen.
J’en retiendrai à coup sûr le bonheur d’être sur l’eau, sous le ciel azuréen, avec des compagnons d’équipée que je vous souhaite de rencontrer à bord très prochainement.
Yves
petit rapporteur