Eté indien annoncé avec ses couleurs automnales, son doux soleil rasant, et son vent aux abonnés absents. Inutile de se presser donc pour l’équipage composé de Marc Vdb en skipper, Daniel D en second et les autres, Jean-Claude G, Laurent Adam (invité de Marc) et moi-même.
Les borains seront sur place vers 11h30 après un périple qui les a promenés de Jurbize, Baudour à Dottignies et Nieuport via l’autoroute de Bruges … Encore heureux que Marc n’a pas dû tenir compte des horaires de marée dans la région de Kortrijk et du courant dans celle de Brugge !
Dans l’intervalle, le bateau, rendu très propre par l’équipage précédent, était apprêté par le régional de l’étape qui accueille ses coéquipiers avec l’avitaillement et la promesse d’un apéro pas trop lointain sur le pont.
Le musoir est atteint vers 13 heures et Bob retrouve son élément limpide, bleu comme rarement, et lisse comme une mer d’huile. Le vent atteint les 5/6 noeuds et est de secteur est.
Nous faisons le choix de prendre la direction de Gravelines en tablant sur une marée haute à 17h30. Pour le lendemain, ce serait un lever à l’aube naissante pour un départ à 07h00 au plus tard avec petit-déjeuner et douche à Dunkerque.
Voileux dans l’âme, nous décidons de nous balancer mollement sous le couvert d’un genois bien ouvert et d’une grand-voile sans ris. Je fais connaissance de mes voisins du bord que je côtoie pour la première fois:
– Daniel Dagrain, évadé belge au pays d’Agde et qui nous revient avec ses compétences ingénioriales, la sagesse d’un âge qui le rapproche du mien, et son extrême gentillesse titillée par une pointe d’humour délicieusement posée;
– Laurent Adam, invité de Marc et professeur de guitare de profession qui nous gâtera tout au long du parcours de morceaux choisis dans les domaines du blues, du rock, du hard métal, du folk irlandais et autre et de la chanson française, mais aussi de ses extraordinaires compétences aux niveaux musical, historique et pédagogique. Laurent est le professeur particulier de Marc qui, heureusement (?) n’a pas emporté son instrument
(de musique). Nous eussions droit à des duos que ma tablette Samsung n’aurait sans doute pas été capable de tenir en mémoire.
Jean-Claude, qui nous a été amené par André C a déjà navigué en début de
saison avec André Rob et fait donc figure d’ancien. Originaire de Courcelles, dont il garde la nostalgie, il a posé ses pénates dans la fière cité de Dottignies à la suite de son fils, kiné dans ce noble village mouscronnois.
Voilà pour le team qui n’a rien de conquérant aujourd’hui et qui fait rapidement honneur au Pays d’Oc rosé et au blanc frappé délicat des Côtes de Blaye. Les sandwiches sont avalés dans la foulée et la sieste musicale s’installe aussi naturellement qu’un dessert de qualité. Honte sur nous qui négligeons nos objectifs et ne tenons compte ni du vent, ni du courant qui nous freine. Notre valeureux moteur imprime un pénible 3,5 milles à l’heure
et ne nous permettra pas d’arriver dans les temps à Gravelines que nous laisserons au loin dans nos fantasmes de diner au “Turbot”, rue de Dunkerque.
Ce sera donc Dunkerque, ses fumées, son port de commerce, ses bateaux de pêche, son activité mais également des voiliers en nombre et des couleurs que nous lui voyons rarement. En quête d’un resto pour terminer la journée, nous essuyons les refus de quatre d’ entre eux, complets pour ce samedi soir et négligeons l’aubaine d’une énorme tente installée sur le port avec dégustation d’huîtres à volonté… Nous aboutissons donc à l'”Essentiel”, rue Winston Churchill à plus d’une demi-heure à pied de Bob. Heureusement, l’essentiel était dans l’assiette et le sourire de la patronne aussi.
Bonne adresse donc !
La matinée de dimanche sera studieuse. Marc, Daniel et Jean-Claude s’attaquent au remplacement de notre écho-sondeur-speedo atteint de DMLA (déficience maculaire liée à l’âge présentant un rond central opacifié). Le Raymarine acheté par Joseph chez Westdiep apparaît dans toute sa nudité noire et inspire Laurent qui distille à sa vue un
blues appuyé suivi d’une chanson mélancolique à souhait de Emily Loiseau. Le bonheur est sur le pont et bientôt dans le tableau de bord qui s’orne rapidement à gauche d’un nouveau cadran cerné d’un trait finement ciselé par Marc de silicone blanc. L’équipage
admiratif s’apprête à fêter l’événement quand je constate qu’à la droite du petit nouveau qui annonce fièrement la profondeur du port de Dunkerque, le cadran dédié au vent n’indique plus rien…
Mon habituelle discrétion, qui n’exclut pas, vous l’aurez constaté, une faconde coutumière de mes rapports épistoliers, m’interdit de poser sur le papier certains écarts de langage qui n’eurent même pas besoin d’être exprimés. Notre PSG est homme de médecine et sait en toutes circonstances exprimer d’un oeil toute la verdeur des
sentiments ressentis.
L’on ouvre à nouveau le ventre de la console et réparons le récalcitrant qui donnera rapidement de nouvelles données de vent qui …. se lève : 9, 10, 11, 12 noeuds dans le port et de secteur ouest. Le portant nous appelle et nous levons l’ancre. Il est 13 heures
et sommes en mer qui n’est que lac, et voiliers qui se dandinent sans plus un pet de vent ! Notre nouveau cadran indique fièrement la profondeur du chenal de Dunkerque, mais est oublieux du reste! Il faudra donc se repencher prochainement sur le problème qui réside
peut-être au niveau de la sonde …
Retour comme aller donc avec énormément de convivialité et de bonheur d’être là avec des amis anciens et nouveaux qui font que avec vent ou sans la voile est à mes yeux un formidable vecteur de sérénité.
Nous rejoignons Nieuport avec la cohorte des marins qui s’engouffrent entre les jetées du port et laissons Bob en H après une manœuvre d’appontage gérée de main de maître par Daniel, tout heureux de retrouver ses sensations.
Voilà un bien long message pour une aussi courte expédition. Je m’en excuse auprès de vous, mais reste heureux de partager avec mes lecteurs les impressions d’un converti “sur un tard” aux merveilles de la mer.
Yves
petit rapporteur